LE CADEAU PERSONNALISE

Lorsque j'ai passé en revue la liste des cadeaux que je comptais offrir à mes proches pour Noël, il en manquait un, et pas des moindres, celui que je réservais à mon fils aîné. Il ne restait pas moins d'une semaine avant le départ en vacances familial dans mon Sud-Ouest natal, et je n'avais mais alors, vraiment aucune idée. Pathétique. Et pourtant, impossible de faire l'impasse. Après un remue-ménage incessant dans ma tête prête à imploser, m'est venue une idée. Alors que nous avions bavardé le matin au téléphone j'ai demandé à mon fils aîné quels étaient ses héros préférés, jeux sur Play Station, entre autres. Je précise que le fiston a 30 ans. Il m'a répondu qu'il ne jouait pas à des jeux de supers héros mais à "un truc un peu médiéval fantastique qui s'appelle World of Warcraft". "Que tu as déjà dû entendre parler" qu'il a rajouté. Mais bien-sûr, moi et le genre fantastique ça fait deux.

Je me souviens de l'époque du Monde de Narnia : Le Lion, la Sorcière blanche et l'Armoire magique : afin de les protéger des bombardements durant la seconde guerre mondiale et fuir Londres, quatre enfants sont expédiés à la campagne. Durant leur séjour ils poussent les portes d'un manoir, chez Monsieur Tumnus. Alors qu'ils jouent à cache-cache et poursuivis par leur tutrice, ils courent se planquer dans l'armoire. Lucy pousse la collection de fourrures du plat de la main, ouvre la porte au fond de cette armoire et les enfants déboulent dans une forêt pas comme les autres, enneigée je crois et peuplée ce créatures qui leur ouvrent les portes d'un monde totalement fantastique. Wouah ! Je me suis dit, j'adore et puis j'ai décroché au fil du film. Puis il y a dans cet autre épisode encore plus fantastique, LE MONDE DE NARNIA : CHAPITRE 3 - L'ODYSSEE DU PASSEUR D'AURORE, les enfants sont dans une chambre lumineuse et sur le mur, un tableau spectaculaire où une mer déchainée semble plus réelle que la peinture elle-mëme. Et là, intrigués et aimantés par ce spectacle peu ordinaire, ils décrochent le tableau, l'eau de cette furieuse mer les submerge violemment et les aspire pour les entrâiner vers le monde magique et merveilleux de Narnia. Là je me suis dit, ça c'est du spectacle fantastique qui m'émerveille totalement.

Forte de toutes ces images en tête, comment créer modestement quelque chose qui sorte un peu de l'ordinaire puisque l'extraordinaire a trouvé ses indéniables talents. Alors j'ai demandé à Monsieur Google de m'ouvrir l'univers fantastique de World of Warcraft et, ça m'ennuie pour mon fils, quoiqu'il s'en tamponne le coquillard (alors pour explication et non des moindres, au Moyen-Age, puisque mon fils m'enjoint d'y retourner un bref instant, le mot coquillard signifiait l'anus...). Et oui, il y a de ces ironies parfois ! Et je découvre un univers fait de créatures qui peupelent des capitales, fort nombreuses, faites d'orcs, d'elfes et que sais-je encore. Alors nous ne sommes plus au cinéma, il s'agit d'un jeu où l'on se déplace pour y vivre certainement d'incroyables aventures. Pour moi cet univers s'arrêtera là.

En parallèle, j'ai déniché une photo du fiston lorsqu'il avait 6 ans, prise chez une belle-soeur qui l'avait grimmé car se tenait l'après-midi même le Carnaval de la ville de Créteil. Il ressemble à un petit pirate qui tient une épée.

Et en regardant d'autres photos anciennes avec lui, récemment, nous avons re-découvert son attrait tout particulier pour les épées faites à partir de tout et n'importe quoi. Exemple, une année à la neige, sur le chemin du retour, les parois de la montagne avaient gelé sur lesquelles pendaient de jolis bâtons de glace. Et bien devinez quoi ? Il est pris en photo en posture de guerrier tendant du bout de sa menotte un glaçon ressemblant à une épée. Alors qu'à cela ne tienne, va pour la photo de pirate et va pour l'épée. Sauf qu'il tient un poignard. J'ai donc imprimé quelques personnages et je n'avais plus qu'à imaginer le décor qui réunirait le tout. J'ai un peu beaucoup piqué l'idée de l'arbre que je trouve géniale.

J'avais pour idée de départ de peindre une forêt, à l'aquarelle, dans les tons bleus, et rapidement je n'ai absolument pas vu de forêt mais plutôt un plan d'eau, donc je me suis laissée guider, c'était étrange, ce n'est pas moi qui ait décidé de la suite. J'ai rajouté des cailloux plats, un buisson, en bas à droite, qui n'a pas été peint avec un pinceau mais avec un bout de papier aluminium froissé, pour voir ce que ça donnait, quitte à rater complètement le décor et à tout recommencer ; l'arbre a pris beaucoup de temps. Une sorte de méditation qui n'en finit pas. Restait plus qu'à installer les personnages et les petites bêtes et mon Arthur. Mais son pied droit relevé me posait problème. J'avais beau déplacer mon petit bonhomme sur tous les coins de la photo, rien n'allait. Dans ces cas-là, on passe à autre chose. Une tasse de thé, j'écoute FIP, ma radio préférée, et je bulle sur mon canapé. Et le lendemain, j'ai tout simplement rajouté une branche basse à mon arbre pour que le petit bonhomme y pose son pied. J'ai rajouté une épée fantastique sur son poignard, collé quelques paillettes bleues sur le plan d'eau et estompé au pastel noir la créature qui sort du buisson. J'ai retrouvé dans mon bureau un cadre que j'ai peint 4 fois à la peinture bleue, j'ai rajouté des fonds de dossier de la même couleur pour unifier le fond du cadre et j'ai finalisé ma création. Hélas, mon fils n'a pas pu venir chercher son cadeau avant Noël car le virus Omicron est venu frapper à la porte de son domicile. Ne jamais ouvir la porte à un inconnu surtout lorsque les médias vous bassinent toute la sainte journée avec les gestes barrière et la distanciation. Trop tard, il l'a pris dans ses filets, l'a contaminé et condamné à passer Noël avec sa compagne avec qui il a partagé un bon réveillon en présence ce ce bon vieux virus. La 3ème assiette était pour lui. Trève de plaisanterie, après les fêtes mon fils a découvert son cadeau, c'atait quitte ou double. Je le connais par coeur, s'il s'était mis à rire aux éclats en me disant "Des barres (de rire), j'aurais été fort déçue. Et bien au contraire, il m'a félicitée en me disant que j'avais absolument compris le concept du jeu, bref, que c'était fantastique. Et de se voir, à l'âge de 6 ans, dans ce tableau très contemporain, mais tenant cette épée fantastique a ranimé sa part d'enfance et a fait éclater sa joie. Comme quoi, pas besoin d'aller Chez Chanel, Louis Vuitton ou Hermès dépenser des mille et des cents. Du papier dessin, de l'aquarelle, de l'eau, beaucoup d'eau, et une sacrée dose d'imagination que j'ai toujours eu fertile. C'est ce que me disait mon père lorsque j'étais enfant.